L'analyse financière, souvent perçue comme un domaine réservé aux experts en finance d'entreprise, est en réalité un outil puissant accessible à tous, investisseurs novices, entrepreneurs et même étudiants en commerce. Loin d'être un labyrinthe de chiffres et de formules complexes, elle recèle des informations précieuses pour comprendre la santé financière d'une entreprise, anticiper ses performances futures et optimiser la gestion des risques. Imaginez un investisseur avisé qui, grâce à une analyse financière rigoureuse des états financiers d'une société cotée, détecte un potentiel de croissance sous-évalué par le marché et réalise un investissement particulièrement fructueux, générant un rendement de 15% en un an.

Bien plus qu'une simple compilation de données chiffrées, l'analyse financière se révèle être un outil de diagnostic performant, permettant de décrypter les forces et les faiblesses d'une organisation, d'évaluer avec précision les risques et les opportunités du marché, et de prendre des décisions éclairées en matière d'investissement, de financement ou de gestion opérationnelle. Elle constitue un véritable "bilan de santé" pour l'entreprise, révélant ses performances passées, présentes et futures. Dans cet article, nous allons explorer les bases de l'analyse financière, ses concepts clés, ses outils essentiels et ses applications concrètes, afin de la rendre plus accessible et utile dans votre quotidien, que vous soyez un professionnel de la finance ou un simple curieux.

Les fondamentaux : démystifier les états financiers et les ratios clés

Pour se familiariser avec l'analyse financière, et en exploiter tout le potentiel, il est primordial de maîtriser les états financiers, qui sont les piliers de toute analyse financière digne de ce nom. Ces documents comptables standardisés, obligatoires pour la plupart des entreprises, fournissent une image claire, précise et détaillée de la situation financière d'une entreprise à un moment donné (bilan) ou sur une période donnée (compte de résultat, tableau des flux de trésorerie). Ils permettent de comprendre en profondeur comment l'entreprise utilise ses ressources, comment elle génère des bénéfices, et comment elle gère sa trésorerie.

Les états financiers : les piliers de l'analyse financière

Les principaux états financiers, au nombre de trois, sont le bilan, le compte de résultat et le tableau des flux de trésorerie. Chacun de ces documents apporte un éclairage spécifique et complémentaire sur la santé financière globale de l'entreprise et permet de répondre à des questions essentielles pour les investisseurs, les créanciers, les analystes financiers et les dirigeants eux-mêmes. L'analyse combinée de ces trois états financiers permet d'obtenir une vision complète et nuancée de la situation financière de l'entreprise.

Le bilan (balance sheet) : la photographie du patrimoine

Le bilan, également appelé "état de la situation financière", est une photographie de la situation financière de l'entreprise à un moment précis, généralement à la fin d'un exercice comptable. Il présente de manière structurée ce que l'entreprise possède (ses actifs), ce qu'elle doit (ses passifs) et la part qui revient aux propriétaires (les capitaux propres). Le bilan est fondé sur l'équation comptable fondamentale, qui doit toujours être vérifiée : Actifs = Passifs + Capitaux Propres. Pensez au bilan comme un inventaire de votre patrimoine personnel : votre maison, votre voiture, vos placements financiers et votre compte courant représentent vos actifs, tandis que votre emprunt immobilier, vos dettes personnelles et vos impôts à payer représentent vos passifs. La différence entre la valeur de vos actifs et le montant de vos passifs représente votre richesse nette ou vos capitaux propres. Pour une entreprise, cette richesse nette est appelée "capitaux propres".

Par exemple, une entreprise du secteur de la distribution, "Boutique Chic", affiche dans son bilan un total d'actifs de 5 millions d'euros, des passifs de 2 millions d'euros (dettes fournisseurs, emprunts bancaires à court terme), et des capitaux propres de 3 millions d'euros (capital social, réserves). Ce simple bilan indique une situation financière globalement saine, avec un niveau d'endettement relativement modéré, inférieur à ses fonds propres. Cependant, une analyse plus approfondie des ratios issus de ce bilan permettra d'affiner ce diagnostic et d'identifier les éventuels points de vigilance.

  • Les actifs circulants (ou actifs à court terme) sont les éléments d'actif qui peuvent être convertis en liquidités en moins d'un an, tels que la trésorerie disponible, les créances clients (montants dus par les clients), et les stocks de marchandises.
  • Les actifs non circulants (ou actifs à long terme) sont les éléments d'actif qui ont une durée de vie supérieure à un an, tels que les immobilisations corporelles (terrains, bâtiments, machines), les immobilisations incorporelles (brevets, marques), et les immobilisations financières (participations dans d'autres entreprises).
  • Les passifs circulants (ou passifs à court terme) sont les dettes à court terme, exigibles dans un délai inférieur à un an, telles que les dettes fournisseurs (montants dus aux fournisseurs), les dettes fiscales (impôts et taxes à payer), et les découverts bancaires.
  • Les passifs non circulants (ou passifs à long terme) sont les dettes à long terme, exigibles dans un délai supérieur à un an, tels que les emprunts bancaires, les obligations, et les dettes financières à long terme.

Deux ratios clés issus du bilan permettent d'évaluer rapidement la santé financière d'une entreprise. Le ratio d'endettement (dette totale / capitaux propres), également appelé "gearing ratio", indique le niveau d'endettement de l'entreprise par rapport à ses fonds propres. Un ratio élevé, supérieur à 1, peut signaler un risque financier important, car l'entreprise est fortement dépendante de ses créanciers. Le ratio de liquidité générale (actif circulant / passif circulant) mesure la capacité de l'entreprise à faire face à ses obligations à court terme. Un ratio inférieur à 1 peut indiquer des difficultés de trésorerie et un risque de défaut de paiement. En 2022, le ratio d'endettement moyen des PME françaises était de 0,8, selon la Banque de France.

Le compte de résultat (income statement) : la performance sur une période

Le compte de résultat, également appelé "état du résultat global", présente la performance financière de l'entreprise sur une période donnée, généralement un an (exercice comptable). Il récapitule de manière synthétique et ordonnée les revenus (chiffre d'affaires), les dépenses (charges d'exploitation, charges financières, impôts) et les bénéfices (ou pertes) de l'entreprise. Imaginez-le comme le relevé de vos revenus et de vos dépenses sur un mois. Votre salaire représente votre chiffre d'affaires, vos factures d'électricité, de téléphone et vos achats représentent vos coûts, et la différence représente votre bénéfice (ou votre épargne, si vous avez réussi à dépenser moins que ce que vous avez gagné!).

Prenons l'exemple d'une entreprise industrielle, "Métal Innovation", qui réalise un chiffre d'affaires de 10 millions d'euros sur l'année 2023, avec des coûts de production (matières premières, salaires du personnel de production) de 6 millions d'euros. Son bénéfice brut (chiffre d'affaires - coûts de production) est donc de 4 millions d'euros. Après déduction des charges d'exploitation (salaires du personnel administratif et commercial, loyers, frais de marketing) de 2 millions d'euros et des impôts sur les sociétés (500 000 euros), son bénéfice net (ou résultat net) s'élève à 1,5 million d'euros. Ces chiffres permettent d'évaluer la rentabilité de l'entreprise, sa capacité à générer des profits, et son efficacité dans la gestion de ses coûts.

  • Le chiffre d'affaires représente le montant total des ventes de biens ou de services réalisées par l'entreprise au cours de la période considérée, hors taxes.
  • Le coût des ventes (ou coût des marchandises vendues) représente le coût des biens vendus ou des services rendus, c'est-à-dire le coût direct de production ou d'acquisition des biens vendus.
  • Le bénéfice brut (ou marge brute) est la différence entre le chiffre d'affaires et le coût des ventes. Il représente la rentabilité de l'activité principale de l'entreprise, avant prise en compte des charges d'exploitation.
  • Les charges d'exploitation représentent les dépenses liées à l'activité courante de l'entreprise, telles que les salaires du personnel administratif et commercial, les loyers, les frais de marketing et de publicité, et les frais généraux.
  • Le bénéfice net (ou résultat net) est le bénéfice après impôts, c'est-à-dire le bénéfice qui revient aux actionnaires après paiement de tous les impôts et charges.

Plusieurs ratios clés issus du compte de résultat permettent d'évaluer la rentabilité d'une entreprise, et de la comparer à celle de ses concurrents. La marge brute (bénéfice brut / chiffre d'affaires) mesure la rentabilité de l'activité principale de l'entreprise. La marge nette (bénéfice net / chiffre d'affaires) mesure la rentabilité globale de l'entreprise, après prise en compte de toutes les charges et des impôts. Le ROA (Return on Assets), ou rentabilité des actifs, indique la rentabilité des actifs de l'entreprise, c'est-à-dire le bénéfice généré par chaque euro investi dans les actifs. Une entreprise avec un ROA de 10% génère 10 euros de bénéfice net pour chaque 100 euros d'actifs. Le ROE (Return on Equity), ou rentabilité des capitaux propres, indique la rentabilité des capitaux propres de l'entreprise, c'est-à-dire le bénéfice généré par chaque euro investi par les actionnaires. En moyenne, le ROE des entreprises du CAC 40 s'élevait à 12,5% en 2023.

Le tableau des flux de trésorerie (cash flow statement) : le suivi des liquidités

Le tableau des flux de trésorerie présente les mouvements de trésorerie de l'entreprise sur une période donnée, généralement un an. Il distingue trois types de flux : les flux de trésorerie liés aux opérations (activité courante), les flux de trésorerie liés aux investissements (acquisition et cession d'actifs à long terme), et les flux de trésorerie liés au financement (emprunts, augmentation de capital, dividendes). La trésorerie est le nerf de la guerre pour toute entreprise, quelle que soit sa taille ou son secteur d'activité. Elle permet de payer les fournisseurs, de verser les salaires, d'investir dans de nouveaux projets, et de faire face aux imprévus. Un tableau des flux de trésorerie positif indique que l'entreprise génère suffisamment de liquidités pour assurer son fonctionnement et son développement. A contrario, un tableau des flux de trésorerie négatif peut signaler des difficultés financières et un risque de cessation de paiement.

Prenons l'exemple d'une entreprise innovante, "Tech Startup", qui affiche un bénéfice net de 1 million d'euros sur l'année 2023, mais des flux de trésorerie négatifs de 500 000 euros. Cette situation paradoxale peut s'expliquer par des délais de paiement clients trop longs (les clients mettent plus de temps à payer leurs factures), des investissements importants dans la recherche et développement (R&D), ou une augmentation significative des stocks de produits finis (l'entreprise a du mal à vendre ses produits). L'analyse approfondie du tableau des flux de trésorerie permet d'identifier les causes de cette situation et d'anticiper les éventuels problèmes de trésorerie à venir, en mettant en place des actions correctives (négociation de délais de paiement plus courts avec les clients, réduction des stocks, recherche de financements).

  • Les flux de trésorerie liés aux opérations (ou flux d'exploitation) sont les flux générés par l'activité courante de l'entreprise, tels que les ventes de biens et de services, les paiements aux fournisseurs, et les paiements des salaires.
  • Les flux de trésorerie liés aux investissements sont les flux liés à l'acquisition et à la cession d'actifs à long terme, tels que l'achat de machines, de bâtiments, ou de participations dans d'autres entreprises.
  • Les flux de trésorerie liés au financement sont les flux liés aux opérations de financement de l'entreprise, tels que les emprunts bancaires, les augmentations de capital, et le versement de dividendes aux actionnaires.

Il est crucial de comprendre que le résultat net, affiché dans le compte de résultat, ne reflète pas toujours la réalité financière de l'entreprise, et notamment sa capacité à générer de la trésorerie. En effet, le résultat net peut être influencé par des éléments non monétaires, tels que les amortissements (dépréciation des actifs à long terme) et les provisions (estimation des pertes futures). Le tableau des flux de trésorerie permet d'avoir une vision plus précise et réaliste de la situation financière de l'entreprise, en mettant en évidence les mouvements de trésorerie réels, et en permettant d'identifier les éventuelles sources de problèmes de trésorerie. En 2023, le secteur de la construction a connu une forte augmentation des délais de paiement clients, impactant négativement les flux de trésorerie des entreprises du secteur.

Décryptage des ratios clés : des indicateurs de performance à la portée de tous

Les ratios financiers sont des indicateurs clés, synthétiques et pertinents, qui permettent d'évaluer la performance, la rentabilité, la solvabilité et la santé financière d'une entreprise. Ils sont calculés à partir des données issues des états financiers (bilan, compte de résultat, tableau des flux de trésorerie) et permettent de comparer la performance de l'entreprise avec celle de ses concurrents, avec la moyenne du secteur d'activité, ou avec ses propres performances passées. Comprendre et interpréter correctement les ratios financiers est essentiel pour prendre des décisions d'investissement éclairées, pour évaluer la capacité d'une entreprise à honorer ses engagements financiers (remboursement de dettes, paiement des fournisseurs), et pour piloter efficacement la gestion de l'entreprise.

L'analyse des ratios doit être réalisée avec prudence, rigueur et objectivité, en tenant compte du contexte économique et sectoriel. Il est important de comparer les ratios de l'entreprise avec ceux de ses concurrents et avec la moyenne du secteur pour avoir une vision objective de sa performance relative. Un ratio considéré comme bon dans un secteur peut être considéré comme mauvais dans un autre secteur d'activité, en raison des spécificités de chaque secteur (niveau d'investissement, cycle d'exploitation, niveau d'endettement). De plus, il est essentiel de suivre l'évolution des ratios dans le temps, afin de détecter les tendances et les éventuels signaux d'alerte.

Présentation d'un tableau récapitulatif des ratios financiers les plus importants

Voici un tableau récapitulatif des ratios financiers les plus importants, classés par catégorie (liquidité, solvabilité, rentabilité, activité), avec leur formule de calcul et leur signification :

  • Ratios de liquidité (court terme) :
    • Ratio de liquidité générale (Actif circulant / Passif circulant) : Capacité à faire face aux dettes à court terme.
    • Ratio de liquidité réduite (Actif circulant - Stocks / Passif circulant) : Capacité à faire face aux dettes à court terme sans vendre les stocks.
  • Ratios de solvabilité (long terme) :
    • Ratio d'endettement (Dette totale / Capitaux propres) : Niveau d'endettement par rapport aux fonds propres.
    • Ratio de couverture des intérêts (Bénéfice avant intérêts et impôts / Charges d'intérêts) : Capacité à payer les intérêts des dettes.
  • Ratios de rentabilité (performance) :
    • Marge brute (Bénéfice brut / Chiffre d'affaires) : Rentabilité de l'activité principale.
    • Marge nette (Bénéfice net / Chiffre d'affaires) : Rentabilité globale après impôts.
    • ROA (Return on Assets) : Rentabilité des actifs.
    • ROE (Return on Equity) : Rentabilité des capitaux propres.
  • Ratios d'activité (efficacité) :
    • Rotation des stocks (Coût des ventes / Stocks) : Efficacité de la gestion des stocks.
    • Délai moyen de recouvrement des créances (Créances clients / Chiffre d'affaires * 365) : Délai moyen pour encaisser les créances clients.

Il est donc essentiel de comprendre comment calculer et interpréter ces ratios pour évaluer la performance et la santé financière d'une entreprise. Chaque ratio apporte un éclairage spécifique et permet de répondre à des questions clés pour les investisseurs, les créanciers et les dirigeants. Une bonne analyse financière se base sur une combinaison pertinente de ces différents ratios.

Explication claire et concise de chaque ratio financier clé

Chaque ratio financier a une formule de calcul spécifique et une signification propre. Il est important de comprendre comment calculer chaque ratio, et comment interpréter la valeur obtenue par rapport à la moyenne du secteur, et par rapport à l'évolution du ratio dans le temps. Un ratio considéré comme bon dans un secteur, par exemple un ratio d'endettement élevé dans le secteur de l'immobilier, peut être considéré comme mauvais dans un autre secteur, par exemple le secteur de la distribution, où les marges sont plus faibles et la trésorerie est essentielle. Il est donc essentiel de comparer les ratios de l'entreprise analysée avec ceux de ses concurrents directs, et avec les données sectorielles de référence.

Par exemple, le ratio de liquidité générale (actif circulant / passif circulant) mesure la capacité de l'entreprise à faire face à ses obligations à court terme (paiement des fournisseurs, remboursement des dettes à court terme). Une valeur supérieure à 1 indique que l'entreprise dispose de suffisamment d'actifs circulants (trésorerie, créances clients, stocks) pour couvrir ses passifs circulants (dettes fournisseurs, dettes fiscales, découverts bancaires). Une valeur inférieure à 1 peut signaler des difficultés de trésorerie et un risque de cessation de paiement. La formule du ratio d'endettement est : (Dette totale / Capitaux propres). Si ce ratio est de 1.5, cela signifie que l'entreprise a 1.5 euros de dettes (emprunts bancaires, dettes financières) pour chaque euro de capitaux propres (capital social, réserves). Un ratio d'endettement élevé peut être acceptable dans certains secteurs, mais il signale une plus grande vulnérabilité en cas de difficultés économiques.

Il est aussi primordial de prendre en compte le contexte économique et sectoriel lors de l'interprétation des ratios financiers. Par exemple, un ratio d'endettement élevé peut être acceptable dans un secteur où les investissements sont importants et nécessitent un recours important à l'emprunt, comme le secteur des infrastructures ou le secteur des télécommunications. En revanche, un ratio d'endettement élevé peut être plus préoccupant dans un secteur où la demande est volatile et les marges sont faibles, comme le secteur du tourisme ou le secteur du transport aérien.

Mise en garde : l'importance de ne pas se fier uniquement aux ratios et de considérer le contexte global

Il est crucial de ne pas se fier uniquement aux ratios financiers, et de considérer le contexte économique, sectoriel, et stratégique de l'entreprise. Les ratios ne sont qu'un outil d'aide à la décision, et doivent être utilisés avec prudence, en complément d'autres sources d'information (analyse qualitative de la stratégie de l'entreprise, étude de marché, analyse de la concurrence). Il est important de prendre en compte d'autres facteurs, tels que la qualité de la direction (expérience, compétence, intégrité), la stratégie de l'entreprise (positionnement, différenciation, innovation), les perspectives d'avenir du secteur (croissance, innovation, réglementation), et les risques spécifiques auxquels l'entreprise est exposée (risques opérationnels, risques financiers, risques juridiques).

En 2022, le secteur de la technologie a connu un ralentissement significatif de la croissance, en raison de la hausse des taux d'intérêt et de l'incertitude économique, ce qui a fortement impacté les ratios financiers de nombreuses entreprises du secteur. Il est donc impératif de tenir compte de ce contexte sectoriel spécifique lors de l'analyse des ratios des entreprises technologiques, et de ne pas se baser uniquement sur les chiffres bruts. Les entreprises de ce secteur ont vu leur ROE baisser en moyenne de 20%, selon une étude de McKinsey.

Techniques d'analyse : au-delà des chiffres - un regard plus profond

L'analyse financière ne se limite pas à la simple observation des chiffres et au calcul des ratios. Il est essentiel d'utiliser des techniques d'analyse plus approfondies, et plus sophistiquées, pour comprendre les tendances, la structure, et la performance d'une entreprise, et pour anticiper ses évolutions futures. Ces techniques permettent d'aller au-delà des chiffres bruts, de mieux appréhender la réalité économique et financière de l'entreprise, et de formuler des recommandations pertinentes et argumentées.

Analyse horizontale (tendances) : l'évolution dans le temps

L'analyse horizontale, également appelée "analyse des tendances", consiste à comparer les états financiers (bilan, compte de résultat, tableau des flux de trésorerie) sur plusieurs périodes (années, trimestres) pour identifier les tendances significatives, positives ou négatives. Elle permet de détecter les évolutions du chiffre d'affaires, des bénéfices, des actifs, des passifs et des flux de trésorerie. L'analyse des tendances permet d'anticiper les performances futures de l'entreprise, de détecter les signaux d'alerte (baisse du chiffre d'affaires, augmentation des dettes), et de comprendre les facteurs qui influencent la performance de l'entreprise.

Par exemple, si le chiffre d'affaires d'une entreprise a augmenté de 10% par an en moyenne au cours des cinq dernières années, mais qu'il a stagné au cours de l'année écoulée, cela peut signaler un ralentissement de la croissance, un essoufflement du marché, ou une perte de compétitivité. Il est important d'analyser les causes de ce ralentissement, d'évaluer son impact sur les performances futures de l'entreprise, et de mettre en place des actions correctives (lancement de nouveaux produits, conquête de nouveaux marchés). L'entreprise Alpha Corp, spécialisée dans la vente en ligne de vêtements, affichait des revenus de 5 millions d'euros en 2018, 6 millions en 2019, 7 millions en 2020, 7.5 millions en 2021 et seulement 7.6 millions en 2022. Il est donc clair que le taux de croissance diminue progressivement au fil du temps, ce qui justifie une analyse approfondie des causes de ce ralentissement.

  • Comparer les états financiers sur plusieurs périodes (années, trimestres) pour identifier les tendances.
  • Identifier les tendances significatives, positives ou négatives (croissance, stagnation, déclin).
  • Utiliser des graphiques et des tableaux pour visualiser les tendances de manière claire et synthétique.

Analyse verticale (structure) : la composition des états financiers

L'analyse verticale, également appelée "analyse de la structure financière", consiste à exprimer chaque poste du bilan et du compte de résultat en pourcentage du total (total des actifs, total des passifs et capitaux propres, chiffre d'affaires). Elle permet d'identifier les éléments les plus importants, ceux qui pèsent le plus dans la structure financière de l'entreprise, et de comparer la structure financière de l'entreprise avec celle de ses concurrents, ou avec la moyenne du secteur. L'analyse verticale permet de mieux comprendre la composition des actifs (quelle part représente la trésorerie, les créances clients, les stocks, les immobilisations), la composition des passifs (quelle part représente les dettes fournisseurs, les dettes financières, les capitaux propres), et la composition des revenus et des dépenses (quelle part représente le coût des ventes, les charges d'exploitation, les impôts).

Par exemple, si le coût des ventes représente 60% du chiffre d'affaires d'une entreprise, cela signifie que pour chaque euro de chiffre d'affaires réalisé, l'entreprise dépense 60 centimes en coûts de production (matières premières, salaires du personnel de production, énergie). Il est important de comparer ce pourcentage avec celui des concurrents, ou avec la moyenne du secteur, pour évaluer l'efficacité de la gestion des coûts de l'entreprise. La société Beta, concurrente d'Alpha Corp dans le secteur de la vente en ligne de vêtements, affiche des coûts de vente représentant 70% de son chiffre d'affaires, une valeur sensiblement plus élevée que la moyenne du secteur qui est de 55%. Cela peut signaler une gestion moins efficace des achats, ou une production plus coûteuse.

  • Exprimer chaque poste du bilan et du compte de résultat en pourcentage du total.
  • Identifier les éléments les plus importants, ceux qui pèsent le plus dans la structure financière de l'entreprise.
  • Comparer la structure financière de l'entreprise à celle de ses concurrents, ou avec la moyenne du secteur.

Analyse comparative (benchmarking) : se situer par rapport à la concurrence

L'analyse comparative, également appelée "benchmarking", consiste à comparer les ratios et les états financiers de l'entreprise avec ceux de ses concurrents directs (entreprises de même taille et du même secteur), ou avec les meilleures pratiques (best practices) observées dans le secteur. Elle permet d'identifier les forces et les faiblesses de l'entreprise par rapport à ses pairs, de mieux évaluer sa performance relative, et de déterminer les axes d'amélioration. L'analyse comparative est un outil essentiel pour prendre des décisions d'investissement éclairées, et pour piloter la performance de l'entreprise.

Par exemple, si le ROE (Return on Equity) d'une entreprise est de 15%, mais que la moyenne du secteur est de 20%, cela signifie que l'entreprise est moins rentable que ses concurrents, et qu'elle utilise moins efficacement ses capitaux propres. Il est important d'analyser les causes de cette différence de rentabilité, d'évaluer les perspectives d'amélioration, et de mettre en place des actions correctives (optimisation des coûts, augmentation des prix, amélioration de la gestion des actifs). L'entreprise Gamma, spécialisée dans la production de cosmétiques bio, a un ROE de 8%, alors que son principal concurrent, Delta, affiche un ROE de 18%. Cela peut s'expliquer par une gestion des coûts moins performante, des prix de vente plus bas, ou une rotation des stocks plus lente.

  • Comparer les ratios et les états financiers de l'entreprise avec ceux de ses concurrents directs, ou avec les meilleures pratiques du secteur.
  • Identifier les forces et les faiblesses de l'entreprise par rapport à ses pairs.
  • Utiliser des données sectorielles de référence pour évaluer la performance relative de l'entreprise.

Analyse SWOT (forces, faiblesses, opportunités, menaces) : une vision stratégique globale

L'analyse SWOT (Strengths, Weaknesses, Opportunities, Threats) est un outil d'analyse stratégique, largement utilisé dans le monde des affaires, qui permet d'identifier les forces (atouts internes), les faiblesses (points faibles internes), les opportunités (facteurs externes favorables) et les menaces (facteurs externes défavorables) qui influencent la performance et le développement d'une entreprise. L'analyse financière peut être intégrée dans une analyse SWOT plus globale, pour apporter une dimension quantitative et objective. Les chiffres issus des états financiers peuvent révéler les forces et les faiblesses de l'entreprise (par exemple, un niveau d'endettement faible est une force, un niveau de stocks élevé est une faiblesse), et aider à identifier les opportunités et les menaces (par exemple, une forte croissance du marché est une opportunité, une nouvelle réglementation environnementale est une menace).

Par exemple, une entreprise avec un ratio d'endettement élevé (faiblesse) peut être considérée comme ayant une faiblesse, car elle est plus vulnérable aux fluctuations des taux d'intérêt et aux crises économiques. Cependant, si cette entreprise opère dans un secteur en forte croissance (opportunité), elle peut avoir des opportunités de développement qui justifient un niveau d'endettement plus élevé (pour financer sa croissance et conquérir de nouvelles parts de marché). Une entreprise avec une trésorerie de 2 millions d'euros (force), dans un secteur en crise et avec de nombreux concurrents ayant des difficultés financières (menace pour les concurrents), peut saisir l'opportunité d'acquérir certains de ses concurrents à bas prix, et renforcer ainsi sa position sur le marché.

Les états financiers d'une entreprise peuvent révéler des informations précieuses sur ses forces et ses faiblesses, notamment les chiffres sur les salaires (une masse salariale maîtrisée est une force), les dépenses en marketing (des investissements marketing efficaces sont une force), les marges de vente (des marges élevées sont une force), et les bénéfices (des bénéfices en croissance sont une force). Tous ces chiffres, analysés dans le cadre d'une analyse SWOT, peuvent aider à identifier les atouts et les points faibles de l'entreprise, et à définir une stratégie pertinente et adaptée au contexte.